segunda-feira, 1 de junho de 2015

Osgood-Schlatter



Maladie d’Osgood-Schlatter

Rev Med Suisse 2008;2060-2063
Résumé
La maladie d’Osgood-Schlatter est une affection douloureuse du genou qui touche les adolescents, particulièrement les sportifs. L’étiologie de cette affection fréquente n’est pas connue. Cette maladie, dont le diagnostic est surtout clinique, se manifeste par des douleurs et une tuméfaction de la tubérosité tibiale déclenchées et aggravées par les activités sportives. Les examens radiologiques, échographiques ou IRM ne sont pas nécessaires pour le diagnostic. Le traitement se base sur l’arrêt des activités sportives, les antalgiques et occasionnellement la physiothérapie. La chirurgie n’est presque jamais utilisée. La symptomatologie douloureuse s’arrête avec la fin de la croissance. Le pronostic à long terme est très bon pour la majorité des patients. Plusieurs études suggèrent une hauteur rotulienne élevée en fin de croissance, sans que soit établi pour l’instant un rôle arthrogène.

Introduction

La maladie d’Osgood-Schlatter est la principale cause de douleur antérieure du genou chez l’adolescent.1 Cette douleur, facilement reproductible à la palpation, est localisée au niveau de l’insertion du ligament rotulien sur la tubérosité tibiale antérieure. Elle est l’une des principales causes de gêne durant et après les activités sportives chez l’adolescent actif. Elle touche environ 4% des adolescents et environ 20% des adolescents sportifs.2 L’étiologie de cette maladie n’est pas connue. Elle peut être unilatérale ou bilatérale. Habituellement, cette maladie guérit à la fin de la croissance, sans laisser de séquelles. Toutefois, plusieurs publications évoquent une association entre cette pathologie et les anomalies de position de la rotule potentiellement arthrogènes à la fin de la croissance.3,4

Rappel histologique et anatomique

La tubérosité tibiale apparaît pendant la période fœtale à partir du segment antérieur de l’épiphyse tibiale proximale entre la 12e et la 15e semaine fœtale.5 Elle reste longtemps cartilagineuse pendant l’enfance. Avant l’adolescence, elle apparaît radiologiquement à partir d’un centre d’ossification du cartilage de l’extrémité supérieure du tibia. Elle va finir de s’ossifier assez tardivement, vers l’âge de 15 ans chez la fille et 17 ans chez le garçon. Pendant sa croissance, la tubérosité tibiale va passer d’abord par une phase fibrocartilagineuse, puis enchondrale avant de s’ossifier complètement. Du point de vue histologique, trois couches différentes sont visibles. La plus proche du tibia est très similaire au cartilage de croissance, avec des cellules de plus petite taille. La zone intermédiaire est formée de cartilage hyalin et de fibrocartilage. La zone la plus superficielle est fibreuse avec une différenciation osseuse progressive selon l’âge. L’ossification se fait donc de la périphérie vers le cartilage de croissance.5

Pathologie

Plusieurs théories sont évoquées pour cette maladie. Aucune n’explique avec certitude son origine. L’hypothèse la plus souvent proposée évoque une croissance «trop rapide et déséquilibrée» du fémur pendant l’adolescence, par rapport à celle des muscles et tendons de la cuisse. Les observations histologiques montrent des micro-fractures de la zone d’insertion du tendon pendant la phase enchondrale de l’ossification de la tubérosité tibiale. Ces micro-fractures donnent une série d’arrachements du cartilage, suivis de cicatrisation. En cas d’échec de cette guérison tissulaire, un ossicule se sépare de la tubérosité et un tissu cicatriciel s’interpose entre cet ossicule séparé et la tubérosité.6
Existe-t-il une fragilisation du cartilage ? A notre connaissance, aucune étude histologique ne le prouve. Le muscle quadriceps en croissance est-il trop puissant pour le cartilage de la tubérosité ? Cette présomption peut s’appuyer sur les constatations observées chez les patients atteints d’une spasticité. En effet, certains patients spastiques présentent une fragmentation osseuse sur une zone d’insertion ostéo-tendineuse, similaire à celle retrouvée aux stades avancés de la maladie d’Osgood-Schlatter, ce qui a été évoqué par Ehrenborg et Rosenthal.7,8 Toutefois, ces constatations évoquées par Rosenthal ne sont pas très fréquentes chez l’enfant spastique. L’origine de cette maladie reste pour l’instant inexplicable.

Clinique

Cette pathologie est typique de l’adolescent de sexe masculin, surtout sportif. Les adolescents atteints présentent une douleur, une tuméfaction localisée et une sensibilité sur la tubérosité tibiale antérieure. La douleur est facilement reproductible lors de la mise en extension du genou contre résistance et lors de la palpation de la tubérosité. Elle est généralement calmée par le repos. Les symptômes sont inconstants et souvent corrélés avec les efforts. Très souvent, la distance talon fesse est augmentée, témoignant d’un raccourcissement fonctionnel du quadriceps. La mesure de l’angle poplité montre aussi souvent une rétraction des muscles ischiojambiers. Aux stades avancés, une voussure peut être visible à la partie antérieure du genou.

Diagnostic différentiel

Le tableau clinique est suffisamment typique pour que les diagnostics différentiels soient très peu nombreux. Toutefois, il faut se méfier d’un arrachement débutant de la tubérosité tibiale, surtout lors de l’apparition d’une douleur aiguë après un effort intense. La maladie de Sinding-Larsen-Johansson est assez similaire mais la douleur se localise sur la pointe de la rotule. Une fracture de stress du tibia proximal peut aussi se manifester avec des douleurs de la métaphyse tibiale supérieure. Tout tableau atypique doit être investigué, surtout s’il y a une aggravation de la douleur après l’arrêt sportif (figure 1).
Figure 1

Prise en charge globale de la maladie d’Osgood-Schlatter

TTA : tubérosité tibiale antérieure.

Examens complémentaires


Radiographies

Une radiographie du genou n’est pas indispensable pour le diagnostic de cette pathologie (figure 2). Elle ne sera demandée que s’il existe un doute clinique. Quand elle est réalisée, on observe une fragmentation de la tubérosité tibiale et un œdème des parties molles. Une radiographie faite en fin d’adolescence permet de classifier le stade final des patients en quatre catégories (tableau 1).9
Figure 2

Maladie d’Osgood-Schlatter

Un ossicule est détaché de la tubérosité tibiale antérieure visible sur la radiographie de profil. La radiographie n’est pas nécessaire pour le diagnostic.
Tableau 1
Classification de la maladie d’Osgood-Schlatter à la fin de la croissance
Stade 1 Radiographies normales Stade 2 Déformations mineures de la tubérosité tibiale antérieure (TTA) Stade 3 Tubérosité tibiale proéminente Stade 4 Tubérosité tibiale avec un ossicule séparé

IRM et échographie

L’IRM et l’échographie ne sont ni nécessaires ni utiles pour le diagnostic et la prise en charge de ces patients. La seule indication pour une IRM est la suspicion d’une pathologie tumorale, exceptionnelle à cette localisation anatomique.

Traitement


Mesures générales

L’arrêt des activités sportives et le repos sont, à l’heure actuelle, le meilleur traitement. Pendant les crises aiguës, ils sont indispensables car la douleur augmente avec les activités physiques. La principale difficulté du traitement est la non-acceptation par certains adolescents de l’arrêt temporaire du sport. Les antalgiques à base de paracétamol ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont utiles et peuvent être prescrits pour calmer la douleur. La physiothérapie n’est pas indispensable. Elle sera adaptée s’il existe des rétractions musculaires constatées cliniquement. Les étirements musculaires sont conseillés pour essayer de diminuer les contraintes d’un muscle «trop court» (soit le quadriceps, soit les ischiojambiers, soit les deux). Les attelles rigides amovibles de décharge ne sont pas indiquées car elles risquent d’entraîner une amyotrophie et une raideur du genou. Elles n’ont jamais prouvé leur utilité. L’immobilisation plâtrée reste aussi rarissime. Elle est conseillée pour l’adolescent qui refuse le congé sportif, ou dans le cas d’une crise algique ne répondant pas aux traitements antalgiques et à l’arrêt des activités sportives. La prise en charge globale de la maladie est exposée à la figure 1.

Chirurgie

La chirurgie est très rarement indiquée. Elle ne doit jamais être réalisée avant la fin de la croissance. Le risque majeur de cette chirurgie pendant l’adolescence est de voir apparaître un genu recurvatum, par fusion iatrogène du cartilage de croissance de la tubérosité tibiale. Les indications sont très controversées. Avant de poser l’indication, on doit se rappeler que les douleurs ont une tendance naturelle à disparaître avec la fin de la croissance. Seuls les cas avec douleurs très invalidantes peuvent nécessiter un geste chirurgical. Dans ces cas, la technique chirurgicale la plus utilisée est la technique décrite par Thomson.10 Il s’agit d’une excision du tissu excessif de la tubérosité tibiale et de (s) l’ossicule(s), après une mobilisation sans détachement du ligament rotulien. D’autres techniques ont été proposées comme la perforation de la tubérosité avec une mèche, la fixation par vis de fragments et même une greffe osseuse, mais leurs résultats semblent moins bons que ceux obtenus avec une résection de l’ossicule et du tissu cicatriciel.11

Perspectives

L’étiologie de cette pathologie reste inconnue. Les dernières séries publiées font l’analyse d’un nombre réduit de patients, ce qui réduit leur portée scientifique. Certains articles3,4 rapportent une position haute de la rotule (patella alta) à la fin de la croissance chez les patients atteints de la maladie d’Osgood-Schlatter. La relation cause-effet de ces observations n’est pas prouvée. Leur éventuel rôle arthrogène n’est pas clair. Des études avec un recul plus important et avec des séries plus conséquentes pourront nous éclairer à l’avenir sur ce rôle hypothétique. L’analyse de la marche pourra peut-être donner des informations objectives sur la fonction musculaire du quadriceps pendant la croissance. D’autres études sont indispensables pour mieux comprendre la physiopathologie de cette affection fréquente.

Conclusion

Parmi ces adolescents sportifs souffrant de la maladie d’Osgood-Schlatter, environ 20% vont développer une excroissance osseuse sur la tubérosité tibiale.10,12 L’apparition de cette excroissance peut prolonger la durée de la symptomatologie douloureuse. Sur le plan clinique, seuls les patients avec une tubérosité tibiale proéminente ou avec un ossicule séparé (environ un quart de patients) peuvent être gênés à moyen terme. La chirurgie ne s’adresse qu’aux cas douloureux avec saillie très importante et ossicule de grande taille. Le résultat de cette chirurgie est inconstant. La majorité des patients reste complètement asymptomatique à la fin de la croissance.

Implications pratiques

> La maladie d’Osgood-Schlatter est une maladie bénigne, fréquente chez l’adolescent
> Le traitement inclut le repos, les antalgiques et parfois la physiothérapie
> Le pronostic à long terme est souvent excellent

    Bibliographie

  1.  Kujala UM, Kvist M, Österman K. Knee injuries in athletes. Review of exertion injuries and retrospective study of outpatient sports clinic material. Sports Med 1986;3:447-60. [Medline]
  2.  Kujala UM, Kvist M, Heinonen O. Osgood-Schlatter’s disease in adolescent athletes. Retrospective study of incidence and duration. Am J Sports Med 1985;13:236-41. [Medline]
  3.  Visuri T, Pihlajamäki HK, Mattila VM, Kiuru M. Elongated patellae at the final stage of Osgood-Schlatter disease : A radiographic study. Knee 2007;14:198-203. [Medline]
  4.  Aparicio G, Abril JC, Calvo E, Alvarez L. Radiologic study of patellar height in Osgood-Schlatter disease. J Pediatr Orthop 1999;17:63-6.
  5.  Ogden JA, Southwick WO. Osgood-Schlatter’s disease and tibial tuberosity development. Clin Orthop Relat Res 1976;116:180-9. [Medline]
  6.  Kasser JR, Mathews PA, MacEwen GD. Tibial tubercle apophysitis in cerebral palsy treated with proximal tibial epiphysiodesis : Report of two cases with 3-year follow-up. J Pediatr Orthop 1988;8:704-6. [Medline]
  7.  Ehrenborg G, Lagregren C. Roentgenologic changes in the Osgood-Schlatter lesion. Acta Chir Scand 1961;121:315-27.
  8.  Rosenthal RK, Levine DB. Fragmentation of the distal pole of the patella in spastic cerebral palsy. J Bone Joint Surg Am 1977;59-A:934-9. [Medline]
  9.  Thomson J. Operative treatment of osteochondritis of the tibial tubercle. J Bone Joint Surg Am 1956;38:142-8. [Medline]
  10.  Mital MA, Matza RA, Cohen J. The so-called unresolved Osgood-Schlatter lesion : A concept based on fifteen surgically treated lesions. J Bone Joint Surg Am 1980;62:732-9. [Medline]
  11.  Binazzi R, Felli L,Vaccari Y Borelli P Surgical treatment of unresolved Osgood-Schlatter. Clin Orthop Relat Res 1993;289:202-4.
  12.  Engel A, Windhager R. Importance of the ossicle and therapy of Osgood-Schlatter disease. Sportverletz Sportschaden 1987;1:100-8. [Medline]
*à lire

La physiothérapie respiratoire : un avantage pour le traitement de la pneumonie ?

Rev Med Suisse 2011;321-321
Cette rubrique présente les résultats d’une revue systématique publiée par la Collaboration Cochrane dans laCochrane Library (www.cochrane.org/). Volontairement limité à un champ de recherche circonscrit, cet article reflète l’état actuel des connaissances de ce domaine. Il ne s’agit donc pas de recommandations pour guider la prise en charge d’une problématique clinique considérée dans sa globalité (guidelines).
Scénario
Une patiente de 73 ans, sans comorbidité, se présente aux urgences avec une toux, une tachypnée et une fièvre à 39˚C. Vous auscultez des râles crépitants fins à la base droite et la radiographie pulmonaire confirme un infiltrat. Vous diagnostiquez une pneumonie basale droite et prescrivez un traitement par amoxicilline/acide clavulanique pour une durée de sept jours. La patiente demande si, en plus du traitement médicamenteux, elle pourrait bénéficier de la physiothérapie respiratoire.
Question
Quel est le rôle de la physiothérapie respiratoire dans le traitement de la pneumonie non compliquée de l’adulte ?

Contexte

Le traitement de la pneumonie repose sur les antibiotiques. Ceux-ci sont parfois associés à l’hydratation intraveineuse, l’oxygénothérapie ou la physiothérapie respiratoire. Le but de cette revue est d’évaluer l’efficacité et la sécurité de la physiothérapie respiratoire dans le traitement de la pneumonie chez l’adulte.

Résultats

Six essais randomisés comparatifs incluant 434 participants hospitalisés ont été identifiés. Les études sélectionnées considéraient les quatre techniques suivantes : la physiothérapie respiratoire conventionnelle (percussions, vibrations, drainage postural), les techniques actives de désencombrement (active cycle of breathing techniques), la pression positive expiratoire et l’ostéopathie. Les résultats montrent que :
  • aucune de ces techniques ne semble avoir d’effet positif significatif sur la mortalité, la guérison ou l’évolution des signes radiographiques ;
  • ces techniques n’induisent pas d’effets secondaires.

Limites

  • Seulement six essais randomisés comparatifs ont été sélectionnés ; ils sont de qualité méthodologique médiocre et ont été réalisés, pour la plupart, avant 1990.
  • Les méta-analyses effectuées n’intègrent que deux essais au plus.
  • La plupart des essais n’incluent qu’un faible nombre de participants.
  • Les patients, tous hospitalisés, sont cliniquement hétérogènes (âge, type et sévérité de la pneumonie).
  • La puissance des études n’a pas été calculée pour détecter les effets secondaires des techniques considérées.

Conclusions des auteurs

Ni la physiothérapie respiratoire conventionnelle, ni les techniques actives de désencombrement, la pression positive expiratoire ou l’ostéopathie ne représentent un avantage en termes de mortalité ou de taux de guérison. Elles ne devraient pas être recommandées dans le traitement de la pneumonie. D’autres essais randomisés comparatifs considérant les développements récents de la physiothérapie respiratoire sont nécessaires.

Réponse à la question clinique

Les études de cette revue systématique, de qualité médiocre, suggèrent que les techniques de physiothérapie respiratoire ne sont pas efficaces comme traitement adjuvant de la pneumonie. Ainsi, de la physiothérapie respiratoire ne devrait pas être prescrite à cette patiente souffrant d’une pneumonie non compliquée, puisqu’elle n’en tirerait aucun avantage.

    Bibliographie

  1.  Référence : Yang M, Yan Y, Yin X, et al. Chest physiotherapy for pneumonia in adults.2010, Issue 2. Art. No.: CD006338. DOI: 10.1002/14651858.CD006338.pub2.

Physiothérapie et ostéopathie : une prise en charge réellement holistique des sportifs

Rev Med Suisse 2010;1504-1507
Résumé
L’encadrement médical et paramédical des sportifs requiert de tous les acteurs de l’équipe soignante une bonne collaboration et une reconnaissance des compétences de chacun.
La physiothérapie et l’ostéopathie sont des activités complémentaires indissociables dans ce contexte. Elles confèrent au praticien possédant cette double formation la possibilité d’apporter au sportif une prise en charge réellement holistique par des techniques efficaces, sûres et éprouvées lors de pathologies traumatiques ou de surcharge ou lors de dysfonctions mécaniques.
Une observation clinique illustre ces propos.

Introduction

Depuis plusieurs décennies l’encadrement médical des sportifs occasionnels comme de haut niveau est une prise en charge pluridisciplinaire dans laquelle le sportif, l’entraîneur, le médecin du sport, le/la physiothérapeute et plus récemment l’ostéopathe, mais aussi le psychologue, le/la diététicien/ne, le podologue, etc. jouent un rôle clé.
Cet encadrement médical et paramédical a certainement contribué, ces dernières années, à potentialiser les performances des sportifs. Il a d’autre part aussi contribué à améliorer l’état de santé général de l’athlète et, par des mesures de prévention, à augmenter la longévité de sa carrière sportive.
L’augmentation du nombre de physiothérapeutes d’équipes, au cours des dernières éditions des Jeux olympiques, et les statistiques de traitements de physiothérapie dans les services de physiothérapie des Villages olympiques à Beijing en 20081 et Vancouver en 2010 sont le témoignage de l’importance de cette prise en charge (figure 1).
Figure 1

Nombre de traitements de physiothérapie journaliers effectués au sein de la polyclinique du Village olympique pendant les Jeux olympiques de Beijing en 2008 sur un total de 2260 traitements du 22 juillet au 23 août 2008

Lors des Jeux olympiques d’été, le service de physiothérapie représente le plus grand service de physiothérapie du monde pendant un mois avec près de 1300 physiothérapeutes, masseurs, chiropraticiens, ostéopathes.1
Afin de répondre à de nombreuses situations thérapeutiques, le/la physiothérapeute dispose d’un grand nombre de méthodes de soins, manuelles ou techniques, issues des dernières connaissances de la physiologie, de la neurophysiologie ainsi que de la cinésiologie articulaire et des technologies modernes.
Les notions de physiothérapeute et d’ostéopathe du sport sont généralement méconnues dans le milieu médical non spécialisé en médecine du sport.2 Il convient donc de définir ces domaines de compétences, qui, si en Suisse, font désormais l’objet de deux professions distinctes au sens des lois cantonales sur la santé publique,3 n’en restent pas moins très proches et complémentaires dans la prise en charge des sportifs.

Physiothérapie : une définition

La physiothérapie est à la fois héritière de techniques très anciennes et bénéficiaire des acquisitions scientifiques les plus récentes. Il s’agit d’une profession de santé qui consiste à traiter le corps humain au moyen d’agents naturels. Son objectif est de diminuer les douleurs et de restituer l’intégralité et la qualité des mouvements entravés par les algies, la maladie, les accidents, les paralysies et autres troubles tant organiques que fonctionnels. Les méthodes utilisées par le physiothérapeute répondent aux principes de l’evidence based therapy. Ces méthodes comprennent notamment :
  • les massages sous toutes ses formes ;
  • tout type de mobilisations et manipulations des articulations, des tissus mous et des organes ;
  • les agents physiques (chaud, froid, électricité, rayons, ondes mécaniques, etc.) ;
  • tous les types de rééducation et de gymnastique médicales.
La physiothérapie se situe donc dans le cadre de pathologies organiques et/ou lorsqu’il y a altération de la structure.

Ostéopathie : une définition

L’ostéopathie, du grec «ostéon» os et «pathos» maladie, est un concept de soins créé par l’Américain Andrew Taylor Still 4 à la fin du XIXe siècle.
L’ostéopathie est basée sur le principe affirmant que le corps possède la capacité de fabriquer ses propres remèdes contre la maladie et autres conditions toxiques lorsqu’il est en état structurel normal dans des conditions environnementales favorables et qu’il est alimenté sainement.
L’ostéopathie met l’emphase sur l’importance de l’aspect mécanique du corps et a recours à des méthodes manipulatives pour détecter et corriger les dysfonctions structurelles, viscérales, énergétiques et crâniennes.
L’ostéopathie est fondée sur l’empirisme et le pragmatisme. Le champ d’application de ce mode de soins s’adresse aux dysfonctions ostéopathiques qui touchent différentes structures en perte de mobilité réversible (viscères, liquides, fascias, muscles, ligaments, articulations des membres, de la colonne vertébrale) sans altération de la structure. Le traitement ostéopathique permet à ces structures anatomiques de retrouver leur mobilité et donc un fonctionnement optimal. L’ostéopathie ne peut en aucun cas se substituer à un traitement médical ordonné pour lutter contre une maladie. Elle peut, parfois, donner une réponse juste et ciblée aux multiples douleurs qui ne trouvent aucune réponse en médecine classique. L’ostéopathie permet un traitement efficace et rapide des dysfonctions les plus diverses. Elle fait appel à des techniques douces appliquées à l’aide de gestes fermes et précis mais en aucun cas forcés. L’ostéopathie se situe donc en amont de la maladie. Elle ne soigne pas des maladies ou des accidents. Elle répond seulement à des troubles fonctionnels réversibles sans lésion de la structure.

Physiothérapeute et ostéopathe du sport : des professions distinctes ?

La réponse est clairement non malgré les évidences légales ! Mais certainement deux formations complémentaires conférant au praticien du sport des compétences plus étendues pour le plus grand bénéfice des athlètes de haut niveau, mais aussi du sportif en général ou du «Tarzan» du dimanche. Le physiothérapeute-ostéopathe allie les deux domaines de compétence et, de par sa formation, sa culture médicale et sa longue tradition de collaboration avec les médecins du sport, est capable de traiter et d’apporter des soins aux sportifs dans ces deux domaines.
Cette double formation est garante pour les athlètes d’une sécurité et d’une prudence sans faille, tant dans l’établissement des diagnostics physiothérapeutiques et ostéopathiques que dans l’application de manœuvres, de méthodes éprouvées, efficaces et sûres. Cette double formation permet réellement une prise en charge holistique des patients.
Cette affirmation est illustrée par l’observation clinique traitée ci-après.

Observation clinique

Diagnostics médical et mécaniste

Mlle Y. K., plongeuse de haut-vol, ressent une violente douleur dans le dos et le flanc gauche lors d’une mauvaise entrée dans l’eau pendant un entraînement précédant une compétition internationale majeure.
L’athlète présente une gêne respiratoire importante, une douleur dans le dos qui irradie en avant vers le sternum. Les mouvements de rotation, d’inclinaison latérale et de flexion/extension du rachis sont quasi impossibles.
Le médecin de son équipe demande un bilan radiologique de la colonne dorsale et du grill costal qui ne démontre aucune lésion structurelle. Le diagnostic de «subluxation» de la sixième côte gauche est posé.
Le diagnostic mécaniste posé par le physiothérapeute-ostéopathe est : «entorse fonctionnelle» de la sixième côte gauche.
La notion d’entorse fonctionnelle ostéopathique5 correspond à une perte de mobilité totale et soudaine d’une articulation par réaction du système proprioceptif à une combinaison d’amplitudes articulaires que le corps ne peut accepter sans perdre son intégrité. Ce système proprioceptif effectue un véritable verrouillage de l’articulation afin de contraindre cette dernière à rester à l’intérieur de l’amplitude physiologique contrairement à l’entorse orthopédique. De ce fait, l’entorse fonctionnelle est réversible.
L’entorse costale fonctionnelle de cette plongeuse s’effectue selon une combinaison simultanée aberrante de trois mouvements sur trois axes physiologiques incluant une restriction de mobilité segmentaire dorsale préexistante (dysfonction vertébrale ostéopathique) :
  • axe BP (pour mouvement costal en «bras de pompe») ;
  • axe AS (pour mouvement costal en «anse de seau») ;
  • torsion du cartilage costal (provoquée par l’élévation et l’avancée du sternum et des côtes).
L’entorse costale provoque une douleur exquise au niveau costo-vertébral gênant la mobilité globale de la cage thoracique et de la colonne dorsale ainsi que les mouvements respiratoires.

Démarche thérapeutique

Le traitement est discuté avec le médecin de l’équipe et, vu la proximité de la compétition (le lendemain), il est décidé de manipuler cette entorse costale malgré la douleur importante et la souffrance des tissus périarticulaires.

Protocole de la première séance

La normalisation de cette entorse se fait en manipulant la sixième côte sur le point d’entorse. L’athlète est allongée en procubitus, le physiothérapeute-ostéopathe prend appui avec le pisiforme de sa main gauche sur le point d’entorse de la sixième côte, sa main droite stabilise l’hémithorax droit.
Une mise en tension de l’articulation est effectuée par une pression verticale progressive (verrouillage du slack) : à la fin de la pression, sans relâcher l’appui, le praticien effectue la manipulation (thrust) verticalement en direction de la table.6,7
Des ultrasons à visée antalgique et anti-inflammatoire sont appliqués avec un gel anti-inflammatoire sur le point d’entorse.
Une contention adhésive combinant le strapping (bandes adhésives élastiques) et le taping (bandes adhésives rigides) a été mise en place pour la fin de la journée et la nuit (figure 2).
Figure 2

Schéma de l’application d’une contention souple et rigide du grill costal

(Illustration d’après Kapandji IA).
Parallèlement, une médication anti-inflammatoire a été ordonnée par le médecin.

Deuxième séance

Le lendemain matin des ultrasons ont été appliqués à nouveau sur la zone douloureuse du point d’entorse et la contention a été refaite pour l’entraînement. Une troisième contention légèrement moins contraignante (plus légère) a été effectuée deux heures avant la compétition.

Troisième séance

Après la compétition, l’athlète a été mise au repos quelques jours avec poursuite du traitement médicamenteux et application d’ultrasons.
Quelques jours après la normalisation de l’entorse costale, il convenait de normaliser la dysfonction vertébrale dorsale qui se situe au même niveau que la côte (sixième vertèbre dorsale). La normalisation se fait en respectant les principes de la mécanique articulaire de Fryette.8
Le praticien effectue aussi des techniques de relâchement myofasciaux de la musculature dorsale contracturée.
Une rééducation costale visant à améliorer la mobilité du grill costal est effectuée sur les côtes 1 à 10 des deux côtés.
Une combinaison de techniques issues de la physiothérapie et de l’ostéopathie aura permis à cette sportive de participer à une grande compétition et, après celle-ci, de retrouver sa pleine capacité fonctionnelle en un nombre restreint de séances.

Conclusion

Cette observation clinique est l’illustration de l’importance de la collaboration entre tous les protagonistes formant l’entourage médical du sportif afin de lui permettre d’atteindre les objectifs qu’il s’est fixé.
Elle est aussi le témoignage de l’indissociable complémentarité des concepts de la physiothérapie et de l’ostéopathie dans le domaine des soins visant à traiter des pathologies avec lésions de la structure (traumatiques) ainsi que des dysfonctions dites ostéopathiques issues de phénomènes de surcharge dus à l’entraînement ainsi qu’aux prédominances fonctionnelles génératrices de dysbalances musculaires.
Ainsi, nous recommandons avec insistance l’acquisition par les physiothérapeutes d’une formation en ostéopathie et vice-versa, aux ostéopathes qui veulent s’occuper efficacement de sportifs, l’acquisition d’une solide formation en physiothérapie. Cette double formation confère au praticien, en charge de sportifs, des compétences plus larges lui permettant une approche thérapeutique réellement holistique.
De plus, compte tenu des ressources financières souvent limitées de la plupart des fédérations de sport et des clubs sportifs, il sera plus avantageux de s’adjoindre les compétences d’un/e praticien/ne possédant cette double formation.

Implications pratiques

> La connaissance des concepts de la physiothérapie et de l’ostéopathie permet au médecin d’orienter le traitement d’un patient sportif
> Le physiothérapeute-ostéopathe traitera des lésions traumatiques de surcharge aussi bien que des dysfonctions mécaniques
> L’approche thérapeutique par la physiothérapie et l’ostéopathie permet une prise en charge globale du patient sportif

    Bibliographie

  1.  Larequi Y. La physiothérapie aux Jeux olympiques de Beijing 2008. Mains Libres, N° 8, 2008.
  2.  Commission médicale du CIO, Physiothérapie du sport,
  3.  Loi sur la santé publique du canton de Vaud, 29 mai 1985.
  4.  Still AT. La philosophie et les principes mécaniques de l’ostéopathie. Paris : Ed. Frison-Roche, 2001.
  5.  Larequi Y. Les entorses fonctionnelles vertébrales, mémoire de fin d’étude en ostéopathie, 1997.
  6.  Rey Lescure A. Les côtes et les dorsales. Polycopiés de cours de rééquilibration fonctionnelle selon Roland Solère, non publié, 1994.
  7.  Maigne R. Douleurs d’origine vertébrales et traitements par manipulations. 3édition. Paris : Expansion Scientifique Française, 1974.
  8.  Fryette HH. Principes de la technique ostéopathique. Paris : Ed. Frison-Roche, épuisé.